VIII.04 - Sensations fortes [abandonné]

Vendredi 5 janvier 2018, New-York

En principe, je ne suis pas du matin mais à bien y réfléchir, c’est pas une pensée humaine ça ? Parce que genre je ne dors pas. Donc en principe, je suis pas festive le matin. Déjà, ça sonne mieux dans ma tête oui, donc le matin, je tire la flemme ou je prépare mon plan B ?

Déjà, c’est quoi le plan A ?

C’est le plan d’Aamon. Plan A comme Aamon donc. Rendre les boites démoniaques puissantes, c’est fait. Attendre la suite qui n’est pas venue. Voir le plan A partir en lambeaux par la faute d’autres démons qui n’ont pas eu la patience d’attendre leur tour d’être liés à une boite démoniaque.

Puis le plan B.

Plan B comme Bis, basique pour le coup et non, pas B pour Basique. Le plan Bis consistant à trouver le moyen de mettre en jeu le Purgatoire entre l’Enfer et le Paradis, sachant que c’est le premier qui devrait tout gagner toutes les âmes des monstres, soit devrait emporter quasiment toutes ces âmes. C’est du long cours comme on dit.

Et là, le plan C.

Plan C comme Chasseur, infiltrer les Chasseurs pour me rendre en quelque sorte invisible quand toutes les boites démoniaques seront détruites, le plan A abattu et une trop grande partie du camps du Bien lancé à mes trousses, tout ça parce que j’ai massacré quelques rassemblements humains, quelques groupes de chasseurs et trois anges.

Pas d'abus quoi.

J’ai développé des techniques afin de débusquer les chasseurs et les chasseuses. Globalement, je répands des informations sur le surnaturel, des signes que le commun des mortels ne comprend évidemment pas mais pas ceux qui chassent et je suis surprise quand j’ai "une touche" d’un certain milieu et là, je découvre qu’une chasseuse prénommée Vorona se fait payer en tant que transporteuse pour des mafieux.

Intéressant !

Je l’approche, je l’observe, et elle est mieux au naturel qu’en photo, je la cerne et je la piège. La chasseuse se réveille en début d’après-midi, sans doute perplexe menottée à une table, dans un poste de police, seule pour le moment mais comment en est-elle arrivée là ? En fin de matinée, elle a accepté et pris en charge une mallette contenant "Dieu sait quoi", en tout cas pas elle, professionnalisme oblige je suppose, destination Cleveland avec une heure limite le soir, rien de trop ardu donc à part les surprises éventuelles en chemin sinon on ne ferait pas appel à elle après tout. Après accord sur le prix de la course, elle l’a prise, la mallette, l’a mise dans sa voiture et juste avant de verrouiller le coffre, la voilà dans les bras de Morphée. C’est parce que j’ai le pouvoir d’assommer à distance, humains, monstres, anges et Gabriel, le quatrième archange, je suis quasiment sure que je pourrais aussi l’assommer à distance.

Quasiment sure.

Vorona donc, je suis la première personne qu’elle voit à son réveil. J’entre, dans ma tenue habituelle plus un pantalon avec deux cafés, ce qui doit me donner l’air d’une fliquette et qu’importe si ce n’est pas le cas, et même qu’importe si c’est le cas.

"Salut."

Ce disant, je m’assois tout sourire sardonique devant elle en mode décontracté, les deux pieds sur la table et je bois les deux cafés, des fois qu’elle ait cru qu’un des deux était pour elle.

"La belle mallette que j’ai en ma possession, trouvée dans ta malle. Pas de doute, tu es dans la mouise, reste à savoir si tu as encore pieds ou si tu es plus que dans la mouise jusqu’au cou, genre si tu ne serais pas déjà en apnée."

La chasseuse / transporteuse / cherchez l’erreur doit se demander où elle a merdé et je la laisse pédaler dans la semoule avant de la mettre au parfum. Est-ce qu’elle se demande si elle a encore le temps pour livrer la mallette dans les délais ? Ca serait ironique qu’elle se pose la question !

Mal de crâne. Genre gros mal de crâne.

C'est la première chose qui vint à l'esprit de Vorona lorsqu'elle se réveilla d'un sommeil sans rêve. Le genre de sommeil qui se veut réparateur, sur le principe, mais qui au final ne l'est absolument pas. Tellement peu réparateur qu'une pauvre sieste de 2h est, en comparaison du sommeil dont elle venait de sortir, aussi reposante qu'une nuit de 12h nue dans un lit king-size avec un matelas bien ferme et des draps en satins. Non pas que Vorona ait déjà fait ce genre de nuit, mais elle imaginait sans peine le confort d'un tel appareillage.

La seconde chose que remarqua Vorona, ce fut la douleur à ses poignets. Le genre de douleurs qui, d'habitude, sont le résultat d'une nuit quelque peu joueuse et "endiablée", si vous voyez de quoi je parle. Deux petits hics à cette théorie cependant.
Petit un, elle était absolument certaine qu'elle n'avait pas fait la bringue la veille, et encore moins avec une autre personne.
Second point, elle se rappelait très clairement s'être réveillée dans un motel à la qualité douteuse, mais qui acceptait les paiements en liquide sans poser de questions, dans la banlieue proche de New York.

Pourquoi New-York ? Oh rien de bien particulier, une simple mission de transport. Comme plusieurs dizaines d'autres qu'elle avait fait par le passé, et qui s'étaient toujours plus ou moins bien passé, si on fait exceptions des quelques accrochages avec les ennemis des clients, que ce soit les membres de gang rivaux ou les flics véreux voulant s'en mettre plein les fouilles sur le dos de la transporteuse.
Bon ok, il est vrai, le client du jour est un peu du genre "risqué". Un espèce de petit prétentieux de la mafia New-Yorkaise, bouffi d'orgueil comme pas permis, avec des idées de grandeur dépassant l'Empire State Building et une ambition qui ferait pâlir de honte n'importe quel Tsar ou Empereur, Alexandre 2 en tête.

Bref, le genre de contrat qu'elle évite, normalement. Mais les finances ne sont pas au beau fixe. Non pas que Vorona soit en difficulté financière - enfin pas plus en difficulté que ca - mais la balance mensuelle commençait à tirer une sale gueule, un peu similaire à celle de Vorona actuellement, et il était hors de question que la situation empire. D'où le fait qu'elle ait accepté cette mission. Et d'où le fait qu'elle se réveille dans cette salle, en début d'après-midi.

Et voilà la troisième chose que remarqua Vorona : l'heure. En début d'après-midi ? Elle se rappelait clairement qu'elle avait récupéré la mallette du client à 10h, 10h30 grand maximum… Alors pourquoi se retrouvait-elle dans une salle de commissariat, qui plus est menottée ?  
(ne demandez pas comment elle savait à quoi ressemblait ce genre de salle, ca serait trop long à expliquer et il faudrait une belle quantité d'alcool à Vorona pour quelle commence ne serait-ce qu'à songer de s'épancher sur le sujet)

Puis les événements se remirent en place petit à petit. Elle se souvient très bien d'être revenue vers sa beauté, une Honda Civic Type R FK-8 de 2017 un peu trafiquée par Vorona, avoir ouvert le coffre, posé la mallette à l'intérieur puis… Et bah rien en fait, rien du tout. Genre le trou noir. Puis d'un seul coup en plus ! Même éreinté de fatigue, elle ne s'était jamais écroulée comme ca !
Réfléchissant rapidement, elle en tira qu'une seule conclusion : il y avait une sorcière dans l'équation. Il y avait peut-être d'autres solutions, mais elle n'en voyait pas à l'heure actuelle. Et le temps, c'était justement la chose dont elle commençait sérieusement à manquer…

-Srat... Dans quelle merde j'me suis fourrée moi encore...

Elle cherchait un moyen de se sortir de la situation lorsque la porte s'ouvrit sur une femme blonde qui portait deux cafés en main. Enfin, ce qu'elle estimait à l'odeur être des cafés. D'habitude elle n'aurait pas dis non à une grosse dose de caféine, mais là, vu la situation, elle allait clairement passer son tour. Enfin, si on lui avait proposé vu que manifestement, il était hors de question pour Vorona d'avoir le droit à une quelconque boisson.
Vorona réfléchit rapidement à ce qui se passait, puis décida de répondre tranquillement. Après tout, c'était pas la première fois que Vorona se retrouvait dans un commissariat. Et à deux exceptions prêt, elle s'en était toujours sortie sans blessures.
Se redressant autant que possible, elle se détendit devant la jeune femme, et planta son regard dans le sien, tout en restant la plus aimable possible.

- Salut et à la tienne, puisque le tutoiement semble de rigueur. Pour te répondre, j'aimerai bien savoir en quoi je suis dans la mouise. Et puis pourquoi me poser la question, vu que manifestement tu en sais beaucoup plus sur la situation que moi ? Parce que la dernière chose dont je me souviens, c'est de m'écrouler coffre ouvert ce matin même sur un parking...

Bon, ok, elle réussissait à garder la façade joviale, mais intérieurement, elle en menait pas large. Elle se rappelait bien de l'horaire limite pour la livraison et d'à quel point le client avait insisté sur le fait que le paquet devait arriver avant l'heure indiqué si Vorona voulait toucher l'argent promis, et accessoirement ne pas se retrouver avec encore un gang aux miches. Clairement, la situation commençait à sentir le souffre, sans mauvais jeu de mot. Une fois sortie de ce bordel - si tant est qu'elle y arrive et avec le colis - elle allait clairement devoir faire du pied taule. Et pas seulement sur 20 bornes...

Un chasseur, une chasseuse sans surnaturel, c’est une brute, un tueur, une tueuse ? Sans le surnaturel, la plupart mèneraient eu ce qu’ils appellent "une vie normale" ? Genre Dean Winchester, mécanicien, son frère médecin, Bobby Singer, donnant des cours de survivalisme. Ca vaut aussi pour les hommes de lettres, genre Hiroto "Machinoto" qui aurait été un homme d’affaires mais toujours aussi coincé et la petite blonde qui m’espionnait, guide touristique ou hôtesse d’accueil pour le salon du bricolage. Et le surnaturel, pour beaucoup est-ce un pretexte pour donner libre cours à leur violence, leur soif de sang ? A présent, j’évite de tuer les incompétents parce qu’ils pourraient être remplacés par des compétents, justement et ces derniers, je peux les utiliser comme cette humaine assise en face de moi. Elle a l’attitude, le regard d’une chasseuse professionnelle et probablement une analyse de la situation de professionnelle. Puis elle a un joli minois mais ça c’est parce que j’ai toujours eu un faible pour les beautés slaves. Et oui, je lui ai naturellement parlé en anglais. Malgré cela, elle a vu la différence subtile entre le tutoiement et le vouvoiement, le premier étant plus familier, moins protocolaire que le deuxième. Moins solennel. Je pourrais lui parler dans sa langue natale mais je ne le ferai pas tant que je n’en verrai pas l’utilité. Or je n’en vois pas l’utilité. Tout comme je ne vais pas me justifier quant au fait que je la tutoie et elle aussi du coup, ce qui ne me dérange évidement pas. Ce serait gonflé si ça me dérangeait, même venant de moi.

"C’est bien ce qui s’est passé. Alors, tu es dans la mouise mais ça peut s’arranger, ça va dépendre de toi. Présentement, je peux te faire coffrer un bon moment et te faire griller de la profession mais ce n'est pas tout."

Je laisse planer un léger silence avant de consulter ma montre, mouais, je ne dois pas non plus traîner.

"Les autres chasseurs flirtent aussi avec l’illégalité mais la plupart d’entre eux voient la mafia et tout ce qui s’y rapporte d’un très mauvais œil, or je peux te l’assurer, tu auras besoin d’eux pour survivre à certaines chasses. Je suis en effet au courant pour le surnaturel."

Un flic entre alors et pas n’importe quel flic, un de mes sbires. Il porte quatre cafés et un sandwich. Je lui fais signe de donner deux café et la nourriture à la captive et je m’enfile un premier café alors qu’il sort aussi vite qu’il est venu. Brave petit.

"Nourris-toi sans délais parce qu’après tu ne devrais plus en avoir le loisir avant ce soir si tu continues à te comporter d'une façon aussi professionnelle. Je te propose ce marché, je garde le silence sur tes activités en dehors des chasses et en retour tu assures régulièrement en tant que transporteuse pour moi."

J’ai mes raisons et je ne vois pas pourquoi je lui en parlerai, en tout cas pas pour le moment.

"Ca commence avec la livraison que tu as acceptée ce matin. Ca va me permettre de voir ce que tu as dans le ventre mais le délai devient tout de même plus en plus serré donc tu devrais te décider rapidement. Oh, c’est vrai que je ne me suis pas encore présentée."

Ceci dit, je bois l'autre café puis je claque des doigts et les menottes de la chasseuse se détachent dans un cliquètement métallique.

"Je suis Alouka, la démone du sexe et du suicide. Je pourrais tenir la dragée haute à un archange alors si tu me décevais ou que tu tentais une bêtise contre moi, je te priverais d’une partie de ton corps et je ferais en sorte qu’elle te manque cruellement. Si tu es réglo, je le serai aussi et je n’entraverai pas "ton fameux devoir de chasseuse". Marché conclu ? Tic tac, l’heure tourne."

J'ai évidemment souligné en quelque sorte "ton fameux devoir de chasseuse" sur un ton très ironique !

Vorona écouta l'énoncé d'Alouka, son cerveau tournant tout de même à toute allure. Parce que même pour elle, ca fait beaucoup. A plus d'un titre.
Déjà, la situation avait de quoi retourner le cerveau de n'importe quelle personne, même la plus professionnelle, peu importe son expérience en terme de métier peu scrupuleux ou de surnaturel. Parce que niveau enchainement foireux, ca se posait là, même pour elle et sa shkoumoune légendaire.

Déjà, point principal, elle avait en face d'elle un démon, enfin, une démone. Elle en avait croisé des monstres dans sa courte expérience dans le surnaturel. Des vampires, des loups-garous, des banshees, des goules et autres. Mais jusqu'à présent, tout le panthéon biblique, elle avait réussi à s'en tenir loin par la force des choses. Situation qui manifestement n'était plus à l'ordre du jour. Et ça, c'est quelque chose qui ne lui plaisait absolument pas.

Point secondaire, la menace planante de la part de la démone. Et ca, autant le fait d'être jugée respectable par les humains lambdas, elle en avait pas ou peu grand chose à faire. Par contre, le fait de se mettre à dos ses camarades chasseurs et chasseuses, ca... On était sur un autre type d'embrouilles... Et elle était clairement pas en situation de se permettre de se passer de toute aide possible.

Et pour finir, le dernier point, et le plus pressant actuellement, était la livraison. Elle avait beau faire des miracle au volant, même pour elle ca commençait à devenir impossible. Enfin, impossible… En restant discrète tout du moins. Le principal problème étant qu'elle allait devoir y aller pleine balle, en faisant fi de toutes les règles du code de la route. Règles qu'elles essaie en général de suivre parce que, contre toute attente, il est souvent plus simple de transporter tout et n'importe quoi en étant aussi discrète que possible.

Elle écouta l'intégralité des propos de la démone, avalant en "express" les deux cafés et commencant à manger le sandwich, ne pouvant retenir un rictus lorsque celle-ci se fendit d'une petite pique sur son travail de chasseuse.

- Alouka donc... Je dirais bien que je suis enchantée mais étant donné que tu es la première représentante du camp démoniaque que je croise, et vu la situation quelque peu figée à ton avantage, tu comprendra aisément que je me passe des politesses d'usages.

Reprenant un croc sur le sandwich, elle fit un rapide calcul concernant ce qui lui fallait pour le trajet, ainsi que ce qui allait suivre.

- Premièrement, pour ce marché, la situation étant ce qu'elle est, on est d'accord. Tu me tiens dans la paume de ta main pour l'instant, alors ca marche. Deuxièmement, si tu veux que j'honore la course pour le client de ce matin, va me falloir bien plus que ces deux pauvres cafés et ce sandwich. Comprends moi bien, ils auraient parfaitement fait l'affaire si je n'avais que 3h de route. En l'occurence on part sur plus du double, et même si tout se passe bien sur le trajet et qu'on arrive a éviter tout type de trafic, il nous faudra tout de même 6 bonnes heures. Me faut à minima 6 Monsters, et les canettes d'1 litre, pas les petites de 35 cL. Et deux sandwichs jambon fromage, même si c'est du cheddar, ou tout autre fromage industriel américain, je prends. Si possible en baguette les sandwichs mais pain viennois ca marche aussi.

Elle laissa quelques secondes à la démone, en profitant pour terminer le sandwich.

-Evidemment, je suppose qu'il est hors de propos que je parte seule vu que tu veux voir ce que je vaut, donc quitte à m'accompagner, j'espère que ton lignage démonique te permettra de me filer un coup de main, même si j'ai peu de doute sur ce sujet. Parce que je peux rivaliser avec des pilotes pro en terme de pilotage et de rythme, mais pas en étant obligé de me défendre.

Elle se leva ensuite, avant d'être prise d'un vertige et de perdre connaissance. Décidemment, elle allait devoir faire tout un check-up médical une fois cette livraison finie, parce que perdre connaissance deux fois dans la même journée, clairement c'était ce qu'on peut appeler un beau signal d'alerte.
Elle repris connaissance au volant de sa Honda, et ca, pour le coup, on était clairement sur le domaine du surnaturel, impression confirmée par la présence d'Alouka sur le siège passager, et du sachet qui contenait manifestement ce qui allait lui permettre de tenir ce rush de dupe.

-... Va pas falloir faire ca trop souvent, parce que c'est clairement perturbant. Eeeet je crois que mon foie est pas fan de la chose.

Démarrant le véhicule, et entrant l'adresse du lieu de rendez vous dans le GPS, elle lança ce contre la montre imprévu.

-Je te dirais bien de t'attacher, mais pas sur que ce soit pertinent. En tout cas, accroche toi, on y va !

Elle commença à appuyer sur l'accélérateur une fois hors de vue du commissariat, croisant fortement les doigts pour que le nombre d'emmerde ne soit pas en augmentation tout en slalomant entre les voitures et se faufilant dans le trafic telle une anguille... Heureusement pour elle, il ne fut pas bien compliqué de sortir du centre et de rejoindre les grands axes, lui permettant d'enfin déployer les chevaux, ainsi que tout les petits ajouts pas tout a fait conventionnels qu'elle avait fait. Et qui étaient un petit peu trop "remarquables" en centre-ville, même pour les agents de la loi les plus laxistes concernant la mécanique.
Alors que le compteur dépassait les 200, elle profita d'une ligne droite pour ouvrir une première cannette de Monster et en prendre une grande rasade. Une fois la canette reposée dans son logement, elle se saisit d'une cigarette dans son paquet, avant de regarder en direction d'Alouka.

-Ca te dérange si je fume sur le trajet ? Parce que la dernière date de ce matin et j'avoue, j'ai un peu besoin de nicotine.

Ah, ces humains, Dieu leur a donné tellement de faiblesses mais aussi de telles forces. Des pulsions difficiles à assouvir, des besoins biologiques démesurément exagérés mais également pour certains une telle résilience et cette chasseuse en a manifestement à revendre de cette capacité sur les difficultés de la vie. Et avec ça un maintien, un comportement très pro qui semble tellement naturel chez elle, comme inné alors que c’est probablement du à beaucoup d’autodiscipline. Puis ses premières paroles sont du vent pour lui donner assez d’assurance et répondre vraiment ensuite, je n’en fais donc pas cas. L’humaine est d’accord parce qu’elle n’a pas le choix et j’apprécie la façon dont elle souligne que je la contrôle pour le moment. C’est vrai que rien n’est définitif. Que ce soit avec le soutien d’un paquet d’anges en faveur de l’humaine ou avec la destruction de ma boite, le rapport de force ne sera pas toujours en ma faveur. Ca signifie que la chasseuse est plus intelligente que prévu et que je dois donc me méfier d’elle. Puis j’éclaterais de rire si je n’avais pas mon contrôle démoniaque sur mon vaisseau quand la mortelle me confond manifestement avec une employée de fast food. Ce n’est pas qu’elle ne manque pas d’air qui m’amuse, c’est le risque qu’elle prend en jouant ainsi avec moi parce qu’à ce petit jeu, c’est moi qui vais le plus m’amuser, si tout le plaisir n’est pas pour moi mais avec toutes ces déviances humaines, on ne sait jamais ! Je ne dis rien non plus à ses paroles suivantes quant à ma présence pendant le transport de la mallette mais elle est perspicace la mortelle. Puis elle se réveille au volant de la voiture avec moi assise à coté d’elle, coté passager et a donc la réponse à une partie de ses interrogations.

"Ca ne me blesserait pas si je passais au travers du pare-brise mais on va quand même éviter."

Je réponds ça après qu’elle m’ait demandé de m’attacher et c’était donc pertinent. Par contre, j’avais juste oublié un truc avec l’achat rapide de sa foutue bouffe. Mon pantalon ! Je le vire et le jette derrière. C’est que je suis pas à l’aise dans ces trucs.

"Ca va mieux et au cas où tu te demanderais, c’est moi qui t’assomme et te réveille. Je suis ta première démone, ben fais un vœu, je suis l’une des plus dangereuses et potentiellement la plus mortelle dans un avenir proche."

Un avenir trop proche, ce que je ne précise évidemment pas. Ceci dit, je mets la ceinture. Vorona roule vite et bien, sa main changeant les vitesses avec doigté, multipliant rapidement les infractions et je me doute que sa plaque est non seulement fausse mais qu’elle doit pouvoir en changer rapidement. Je souris en voyant son GPS mais elle me devance en me posant une question qui me fait rire. Est-ce qu’elle demande la permission avant d’embrasser ?

"Chérie, je bois des boissons et je m’enfile dans le nez des substances qui te laisseraient raide morte. Evidemmennt que tu peux fumer autant que tu veux, j’ai participé aux campagnes publicitaires qui vantaient la fameuse émancipation des femmes par le tabac."

Ce disant, je pioche un cigare cubain dans la boite à gants, un ajout personnel.

"Sers-toi hein si tu le désires, ça compensera peut-être un peu la bouffe."

Alors, j’ai joué le jeu pour les boissons, j’en ai même mis le double du minimum demandé et j’ai triplé la quantité de bouffe sauf que ce sont les légendaires sandwichs anglais, ceux coupés en triangles. Oh pour nourrir, ça va la nourrir mais niveau goût … Puis j’aurais pu ne rien lui donner, j’aurais pu lui donner l’énergie de conduire sans avoir à se nourrir mais je suis trop curieuse de la voir conduire tout en manipulant de la bouffe. Et c’est là que je réalise qu’il y a trop de foutues lignes droites immenses dans ce pays.

Ce n'est pas grave, il reste le GPS.

Je le désactive. Par la pensée ? Non, je tends la main et je l’éteins et cette fois c’est moi qui devance la pilote.

"On n’arrivera pas à l’heure avec ce gadget et je connais le trajet pour réussir ce transport pile à l’heure. Tout est dans ma tête. Tourne à gauche dans cent mètres, deux fois la première à gauche et puis tout droit sur cinq cent mètres. On va éviter tout le trafic par là."

Je la préviens un peu à l’avance parce qu’une voiture de police vient de se placer derrière nous, puis une deuxième et une autre encore, tout ça parce qu’on a une conduite sportive ! Ma première idée est de les neutraliser mais je me ravise parce qu’ils n’utiliseront pas leurs armes à feu, je laisse donc le soin à Vorona de les semer, histoire de la voir en action en sachant qu’on arrivera bientôt dans une des pires zones de la ville pour quitter New-York, une zone où les flics ne vont qu’en surnombre. Ca c’est sur que le GPS ne nous aurait pas emmenées là !

Vorona écouta sans broncher les réponses d'Alouka, ne pouvant se retenir de lever un sourcil d'étonnement lorsqu'elle retira son pantalon et l'envoya bazarder sur la banquette arrière. Non pas que ca la dérangeait sur le principe, mais elle ne s'attendait clairement pas à ca.

Ainsi donc, non seulement elle se retrouvait aux prises avec une entité démoniaque, mais celle-ci se situait en haut de la chaine alimentaire des Enfers... Décidément, il valait mieux pas qu'elle tente de jouer au loto cette semaine, sa chance était définitivement en berne. Au moins, elle avait l'occasion d'en apprendre un peu plus sur les différentes habilitées sur les membres du Pandémonium, c'était toujours ca de prit.

Elle ne put retenir un éclat de rire quand la démone lui répondit concernant la cigarette, que ce soit par le "chérie" en début de phrase ou l'apparente méprise au sujet du pourquoi de sa question.


-Ne te méprends pas Alouka, je me doutes que les démons et démones doivent carburer à des trucs qui m'enverraient direct pour un allée simple en compagnie de Charon, mais je posais la question pour un aspect purement olfactif. Etant donné que tu es la première représente de la gente démoniaque que je croise, et vu tes spécialités, je me suis permise cette question, ne sachant pas vraiment sur quel pied danser à ce sujet. Mais au vu de ce petit ajout, dit-elle en désignant du menton les cigares cubains, j'ai clairement la réponse à ma question. Et non merci, les cigares ont une fumée trop épaisse pour moi lorsque je conduis.

Elle appuya son propos en baissant légèrement la fenêtre côté passager, suffisamment pour que l'air extérieur aspire les vapeurs cubaines sans pour autant foutre des bourrasques sur le visage de sa passagère.


- Après, si jamais on arrive en état pour s'en fumer un quand la livraison sera effectuée, pourquoi pas. Mon dernier remonte a plusieurs années, et j'ai jamais eu l'occasion de tester des cigares cubain véritables.


Mais pour arriver à destination, encore fallait-il réussir à sortir de New-York et son trafic infâme. Heureusement qu'elle avait cette application GPS un peu underground pour la guider au mieux dans le flot de la...
Le GPS vous disiez ? Ah bah finalement non. C'est pas la machine qui était en rade hein, mais la démone qui coupa l'appareil, avant de donner des instructions à Vorona. Celle-ci en resta coi quelques seconde, avant de soupirer. Décidemment, cette course allait être un sacré boxon, et certainement l'une des plus justes de sa carrière. Et vu le petit trio de gyrophares - ah pardon, quatuor maintenant - qui lui collait aux basques, cela ne faisaient qu'annoncer la couleur pour le reste du trajet.


-On va la jouer en mode spéciale de rallye donc.... Copy, gauche 100 mètres.


Appuyant sur un bouton, elle lança la sono de sa voiture, et activa sa playlist spéciale "pied au plancher". Une gentille sélection de musiques alternant métal bien rythmé et eurobeats à la cadence endiablée.



Suivant les indications de la démone, Vorona s'engouffra dans des petites rues de New-York, faisant rugir le moteur de sa Honda sous l'effet des rétrogradages et passages de vitesses qu'on pouvait aisément qualifier de sportifs. Esquivant les traineurs ainsi que les marcheurs, Vorona commença à pester intérieurement. En soit, à allure classique, le chemin présenté par Alouka serait tout à fait pertinent. Cependant, à cette allure et avec ce genre de conduite, la seule chose qu'elles allaient gagner seraient une palanquée de flics en mode course-poursuite. Et au vu de la tournure des choses, elle soupçonnait que la démone avait délibérément coupé le GPS et lui donnait ces indications afin de pimenter un peu la situation, alors que l'ensemble ressemblait déjà à un chili con carne mexicain bien relevé...


-Bojié moï... Ca va être folklorique encore ces conneries...


Alors qu'elle arrivait à un croisement de grands axes et suivant les indications d'Alouka, Vorona fit déraper la voiture afin de garder un maximum de vitesse en sortie. Et elle se retrouva avec une énième voiture de police mais qui, contrairement à la dizaine déjà présente derrière elle, collait sa portière. Ne pouvant pas freiner sans risquer de se faire éperonner par les agents de la maréchaussée collés à son pare-chocs arrière, et ayant une ouverture au niveau du trafic devant elle, la jeune slave lâcha un virulent "chert voz'mi" avant d'appuyer sur un des nombreux boutons présents sur le volant. Aussitôt, un sifflement aïgu retentit et un gros boost se fit ressentir dans l'habitacle, pendant que les voitures de flics s'éloignèrent petit à petit de la petite mais véloce Honda qui fonçait pleine balle dans les rues de New-York.


-Si jamais tu peux me donner une estimation précise de la distance qui nous sépare de la sortie de la ville, et donc de la diminution de la quantité de rats nous collant aux fesses, je suis preneuse. Parce que j'ai quelques autres gadgets du style mais si on doit faire 6h de courses poursuites de ce niveau, va falloir un peu plus que mes talents de pilote pour qu'on s'en sorte.

Je souris en écoutant Vorona me dire pour la deuxième fois que c’est la première fois qu’elle rencontre une créature démoniaque et mon sourire s’élargit parce que cette femme n’est pas du style à se répéter sans avoir un dessein précis en tête. C’est le genre de mortelle à ne rien faire par hasard, à savoir s’adapter à toute forme de situation.

"C'est une sorte de dépucelage mais tu fais bien de rester concentrée."

Il y en a "une ou deux choses" qu’elle n’a pas faite avec une démone mais qu’elle reste pro et je verrai si elle mérite une gratification supplémentaire en dehors de la "légère augmentation" de sa prime qui l’attend si elle réussit ce transport. Puis je ris quand la chasseuse tente d’évacuer l’air par la fenêtre entrouverte.

"Il suffisait de demander."

Ce disant, je manipule l’air et la fumée se transforme en deux formes compactes et distinctes qui ne risquent pas de menacer son champs de vision et par jeu, je leur donne l’aspect de mes mains courant sur son corps.

"Soit tu n’est pas chatouilleuse, soit tu te contrôles très bien."

Je dissipe néanmoins les mains avant de jeter le cigare dont je n’ai plus envie. Puis l’humaine met une musique qui me plaît beaucoup et je décide de m’installer un peu mieux du coup.

"Elle envoie du lourd ta musique, j’aime beaucoup."

Tout en me dandinant sur le rythme de la musique, je décroche cette fichue ceinture de sécurité parce que je pourrai exercer une telle pression sur mon corps en cas d’arrêt brutal du véhicule que je ne bougerais pas d’un iota même s’il faisait des tonneaux et bien sur je pourrai faire de même avec la russe, si j’en ai envie même si je prévois de nous faire arriver à bon port sans abîmer la transporteuse et son outil de travail.

"Tu es très habile avec tes mains."

Lui dis-je quand elle sème les flics et qu’elle ne se fasse pas de souci pour la musique, même réglée à fond, je peux l’entendre sans problème sans qu’elle ait à hausser la voix, mais ça, c’était le cas avant que je devienne une démone surpuissante, ce qui change c’est que je fais en sorte qu’elle aussi m’entende sans que j’ai à crier.

"Pas besoin, ça va être rapide … Et par l’Enfer, j’avais oublié qu’on traverserait pendant qu’ils dorment."

On traverse toute l’une des zones les plus malfamées de New-York et il faut que ce soit pendant que les gangs dorment à poings fermés. Alors moi aussi je suis "un oiseau de nuit" sauf que les démons ne dorment pas, eux.

"Halala, New York, la ville qui ne dort jamais, au temps pour les explosions."

Je hausse les épaules. Ce n’est pas grave, on se rattrapera niveau action par la suite, me dis-je en m’adossant au coin que forme le fauteuil et la portière, de sorte que je peux encore plus observer l’artiste exercer un contrôle pas loin d’être total sur son véhicule. Je veille aussi à ne pas gêner sa conduite, sauf peut-être visuellement mais elle est une pro, elle ne devrait pas être perturbée par ma pose légèrement indécente.

"On prend la 280, c’est l’autoroute la plus chère du réseau, aussi est-elle moins empruntée mais on n’aura pas à s’arrêter pour payer parce qu’on ne va évidemment pas payer. Oh et ne t’en fais pas pour le trafic en face de nous."

C’est qu’avant d’arriver à la 280, il y un carrefour pour aller aussi à la 95 qui elle est moins rapide mais aussi moins chère aussi Vorona doit elle surgir devant nous pas loin de trois kilomètres d’embouteillage mais elle doit se douter que j’ai quelque chose derrière la tête et c’est bien sur le cas.

"Fonce, pied au plancher, je te fais une "Moïse", ça va être amusant."

Je lui fais une "Moïse" dans le sens où comme lui séparant la mer rouge en deux, je sépare le trafic routier en poussant les véhicules sur les cotés juste avant qu’on passe compte tenu de la vitesse du bolide et je dois dire que même pour toi c’est plutôt exaltant !

"C’est un miracle !"

Je m’exclame ainsi en faisant mine de gratter de la guitare électrique au rythme de la musique. Motos, voitures de tourisme, camions, poids lourds, tout s’écarte sans trop de heurs à notre passage et Vorona doit être contente que les vitres de sa voiture soient assez opaques pour que personne ne puisse l’identifier par la suite.

"La 280 constitue la moitié du parcours. Je serais curieuse de te voir utiliser tes gadgets et après tu pourras gouter à mes cigares, par exemple."

Je n'avais pas oublié ses paroles, puis c'est une distance à faire presque en ligne droite, du moins "en une courbe presque droite" mais Vorona ne devrait pas tarder à entendre les sirènes des autorités locales lancées à notre poursuite !