III.04 - I'm not drunk at all (ft. Malphas)

Il avait atterrit il ne savait trop comment dans un des bars de Huntfield. Il avait quitté Mia quelques jours plus tôt, repoussé par elle et ne sachant quoi faire. Il avait préféré partir, ne pas insister. Ce n’était pas lui sinon. Froid, indifférent, ne se souciant que de peu de gens, et de préférence assez fort pour survivre, c’est pour ces raisons qu’il avait laissé Simon et Eleonora, bien qu’humains, entrer un minimum dans son monde. Et quel triste monde ! Il sirotait un verre de whisky, lui, haïssant l’alcool. Il termina le fond de son verre, le goût âpre du Long John râpant sa gorge. Il se retint de tousser et remercia le barman de ne servir que de petites quantités pour faire du chiffre sans doute.

Il regarda le fond de son verre. Il avait bu doucement, se perdant dans ses pensées tandis que le temps défilait, indifférent, aussi ne sentait-il pas réellement les effets de la boisson sur lui. Une heureuse chose malgré cet excès. Il n’aimait pas se sentir ivre. Il fit tourner le verre entre ses doigts habiles avant de le reposer sur un coin de la table quand il aperçut qu’un serveur s’approchait pour le débarrasser.

Il le suivit du regard et il s’attarda sur les autres clients. Certains jouaient aux fléchettes tout en sirotant une bière et riant grassement à une blague qu’il n’entendait pas, à sa plus grande satisfaction. D’autres buvaient à outrance, entre amis ou seuls, mais toujours trop. Lesquels parviendraient à rejoindre leurs foyers ? Lesquels n’y parviendraient pas ? Lesquels seront sages et lesquels ne le seront pas ? Préférant le frisson de l’inconscience au tendre repos d’une nuit. Il était entouré d’un brouhaha indistinct et s’y mêlait par contrainte. Désirant être seul sans l’être totalement, avoir l’impression d’exister d’une manière éphémère et anonyme. La solution était facile, toute trouvée, il n’y avait pas meilleur endroit pour s’emplir des bruits de la vie et de ses problèmes.

Comme souvent, il passa une main dans ses cheveux avant de la ramener sur son front, posant son coude sur la table, il appuya sa tête soudainement lourde dans sa paume. Il ne voyait rien d’autre que cette entaille sur la table en bois où il était assit. Tout autour de lui semblait flou, indistinct, s’effaçait. Comme si, petit à petit, il s’effaçait de ce plan existentiel pour en intégrer un autre, une sorte d’entre deux mondes où ne régnait que la solitude et le bruit mêler de façon étrangement complémentaire. Un monde bruyant, vivant, dont on est exclut et indésirable.

Une voix s’élevant au dessus de toutes les autres le sorti de sa contemplation. Sa table étant près du bar, il avait une vue imprenable sur la scène. Un homme, sans doute mécontent, menaçait le barman du poing. Sans doute que ce dernier avait refusé de le resservir à la vue de son état, et l’autre avait, semble-t-il, l’alcool mauvais. Blood le vit, dans un état second, encadrer le visage du pauvre homme de ses mains et projeter son visage vers l’avant afin de lui faire rencontrer le bois du bar plus intimement. L’autre cria de douleur, le nez en sang et très probablement cassé, tentant d’arrêter l’écoulement du fluide vital. L’ivrogne revint à la charge, mais cette fois-ci Blood ne resta pas sans rien faire. Il se leva rapidement et attrapa le poing de l’homme avant que ce dernier ne l’abatte sur la mâchoire du barman.

« Dégage de là l’éponge, t’en a bien assez fait ! »

L’autre baragouina quelques paroles incompréhensibles avant de lever son autre poing en direction du chasseur. Blood ne lui laissa pas le temps de frapper qu’il lui tordit le poignet qu’il avait encore en sa possession et abattit son propre poing sur le visage de l’alcoolisé qui s’effondra à terre, assommé mais sans doute aussi ivre mort.

Spoiler:

Vous savez, même pour un démon, il y a toujours 24 heures dans une journée. Malphas s'amusait bien à tuer les gens à l'hôpital. Il prenait beaucoup de plaisir à faire endeuiller les proches et les familles des victimes. Il jouissait à donner de l'espoir pour ensuite briser les rêves et l'espoir des malades. Oui, il adore ce qu'il fait, mais il aime également bien se détendre et être de nouveau lui sans devoir jouer un rôle. C'est beau de côtoyer toujours les mêmes collègues, d'être toujours enfermé dans ces mêmes murs. C'est bien de toujours faire semblant d'être empathique, de faire semblant d'aimer ses collègues et de faire croire aux gens d'être triste et désolé pour la mort de leur proche. Mais à force, Malphas a besoin de souffler, de sortir de cet environnement et d'être lui-même, sans devoir mentir et jouer ce rôle de gentil docteur et chirurgien constamment. De temps en temps, il va donc se poser dans les bars, et de regarder les âmes perdues. Bien entendu, il n'a pas d'endroit de préférence, ni d'endroit "fétiche". Il rentre dans un bar, choisit au hasard et regarde ce qu'il se passe autour de lui. Bien souvent, il écoute la détresse des gens se noyant dans l'alcool. Deuils, problèmes familiaux, divorces, addictions à l'alcool, voici les sujets revenant à chaque fois. Malphas écoute ces détresses, ces tristesses et il est heureux de savoir que les humains se sentent tristes et inutiles. Mais ce soir-là, en rentrant dans ce bar le "Buscaron's Life", Malphas avait cette étrange impression qu'il allait se passer quelque chose de différent.

Cela faisait quelques heures qu'il était assis au fond du bar, dans un coin sombre pour mieux savoir observer les gens. Il y avait un brouhaha incroyable, mais en lisant le langage corporel de ces pauvres âmes perdues, il savait lesquelles étaient dans la détresse et d'autres étaient là juste pour boire un verre avec leurs amis. Peut-être qu'un jour, il verrait un de cela sur sa table d'opération. Il prendrait un plaisir fou de le tuer discrètement. Il avait son coude gauche sur la table, et sa main droite faisant tournoyer son verre de whisky quand soudain, une voix se fit entendre au loin. Un homme totalement ivre menaça le barman, le frappa une première fois. Le tenancier hurla de douleur, ce qui fit sourire Malphas. Il chargea de nouveau quand tout d'un coup, un homme venant de nulle part maîtrisa l'homme saoul en lui mettant un uppercut très bien placé sur sa mâchoire. Il s'écroula par terre, sans hurlement. Sûrement que ce héros national l'a assommé en un coup. Malphas sourit de plus en plus devant cette violence. Malphas finit le fond de son verre d'un coup, et appela ce héros tout en le pointant du doigt.

"Hé toi! Oui toi! Viens un coup à ma table! J'te paie un verre c'est ma tournée!" dit-il tout en restant dans le coin sombre pour rester un maximum mystérieux. Il tourna la tête vers le barman et demanda une nouvelle commande. "Arrête de chialer stp et remet un whisky pour moi et pour ton héros" Il regarda de nouveau cet homme. "C'est quoi ton nom? Moi c'est John Smith" fit-il avec un grand sourire.

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Ne t'inquiète pas, c'était juste parfait comme ouverture, j'adore Very Happy

j'espère que ça te plait

Il avait encore du mal à réaliser ce qu’il venait de faire. Une perte de contrôle momentanée aux conséquences qui pourraient être désastreuses. Il restait là, sur place, observant l’homme au sol, gémissant et en se tenant le nez et couvrant sa joue de la paume de sa main. Ses jambes battaient l’air et son dos serpentait sur le sol. A la fois satisfait et horrifié, il ne pouvait pas détacher ses yeux de cet être pitoyable qui roulait sur le sol, couinant de douleur de façon pathétique. Il resta à cette place de nombreuses secondes qui lui semblèrent interminable avant d’avoir la force de s’en détourner.

Il prit tout de même le temps de se retourner vers le barman et de s’enquérir de son état. Ce dernier était encore un peu sonner mais gémissait moins que l’homme à terre, homme qui fut dégagé par d’autres clients plus frais tandis que d’autres le dévisageaient avec méfiance. Ce genre de regard que l’on subit en silence tout en détestant cela.

Il tourna son regard vers le fond de la salle, dans un coin à l’ombre, on l’invitait à prendre un verre avec lui. Ses épaules se secouèrent d’un rire quand il s’entendit appeler « héros ». Il n’avait rien d’un héro. Un héro s’occupe de toutes les injustices et non pas uniquement de celles qui le dérangent personnellement, de manière directe ou non. Ce type le dérangeait, alors il s’en était occupé. Et cette pensée ne faisait que le rendre plus monstrueux encore.

Il considéra l’offre de l’homme dans l’ombre. Se retirer au fond de la salle ferait en sorte que les tensions s’apaisent, calmer les esprits et ainsi se faire oublier. Alors il alla dans l’ombre, cachette salvatrice, tira la chaise en face de l’homme et s’y laissa tomber. Il plissa le nez quand il l’entendit s’adresser au barman comme si ce dernier lui devait la lune et l’or du monde, cependant il ne dit rien. Quand les consommations leurs furent apportés, il repoussa la sienne vers l’homme.

« Tenez, c’est gentil à vous mais je n’ai pas pour habitude de boire plus qu’une bière. »

Il lui offrit un sourire d’excuse qui lui fut difficile de faire apparaître sur son visage. Son regard se fixa alors sur une lampe toute proche dans laquelle d’énormes mouches se cognaient inlassablement, leurs bourdonnements résonnant dans ce halo de lumière terne.

« A qui ai-je l’honneur ? » demanda-t-il après quelques secondes de silence, reportant son attention sur l’autre, qui restait toujours souriant.

Spoiler:

Ce jeune homme s'approcha de Malphas, et refusa le verre offert par le démon. Ce dernier haussa les épaules, s'avança sur sa chaise, mit les coudes sur la table et avança pour que son visage soit éclairé par l'ampoule au-dessus de la table. Ainsi, cet homme devant lui pouvait voir son sourire mesquin. Il donna un regard fixe sur la chaise libre devant lui. "Tiens, installe-toi, on va parler". Il regarda le barman, nettoyant son nez en sang. "T'vas mettre 2 verres! Moi un whisky j'ai dit, et pour héros demande-lui ce qu'il aime. Et grouille toi s'il-te-plait, on a soif." dit-il au barman. Il tourna la tête, et regarda l'homme en face de lui. "Tu ne vas quand même pas refuser un verre? J'vois que tu crèves de soif" dit-il à Blood cette fois-ci.

Cet homme voulait savoir qui était John Smith, ou plutôt Malphas. Ce dernier n'avait aucune idée si cet homme savait qu'il était en face d'un démon. Du moins, il avait le sentiment qu'il était dans l'ignorance. Il avait une envie incroyable de cligner des yeux afin de les faire apparaître noirs, pour voir la réaction de l'humain. Va-t-il fuir de peur? Va-t-il rester par curiosité? Va-t-il passer un pacte? Tellement de possibilités! Mais Malphas préféra rester prudent pour le moment. Il va donc présenter son propre véhicule, à savoir ce chirurgien très compétent et très bien vu dans son entourage. De plus, il n'avait pas envie de repenser à la triste enfance qu'il a eue. Oui, son père était un ivrogne qui battait son fils, ainsi que sa femme. Le malheureux enfant a vu mourir sa maman battue à mort par son géniteur. Il est également responsable de la mort de son père grâce à un pacte d'un démon dont il n'a aucune idée de son identité. Triste enfance, et triste réalité. C'est pourquoi il préféra présenter ce John Smith. "Moi c'est John Smith, et j'suis chirurgien dans l'hôpital en face. Après, j'ne sais pas quoi trop dire, je ne vous connais pas. Il paraît que c'est mal de parler aux inconnus en ce moment, surtout depuis…" Il tourna la tête, afin de regarder autour de lui pour faire semblant d'être prudent. "Depuis qu'il y a plein de créatures. Vous savez tous les monstres dont on parle? Les démons, les méchants monstres et tout ça.".

Malphas fut coupé par le barman, rapportant les 2 boissons dont le whisky pour le démon. Il prit son verre, le leva afin de le cogner contre celui de son nouveau camarade. "Santé! Et à la santé du type à terre que tu as massacré" hurla-t-il ironiquement afin que tout le monde ait l'attention sur eux. Il ramena ensuite son verre près de sa bouche, et but une grosse gorgée tout en fixant l'homme devant lui. "Vous ne buvez pas? Il se passe quoi? C'n'est qu'un verre" dit-il en rigolant – ou en faisant semblant de rigoler – "Je suis médecin, vous ne craignez rien. Un verre de temps en temps ne peut que faire du bien, surtout pour faire baisser l'adrénaline".

Blood n’arrivait pas à savoir si la façon de se comporter de en face de lui était naturelle ou une espèce de jeu bizarre, un rôle qu’il se plaisait à interpréter. Pour le moment il n’en avait pas la moindre idée et il n’aimait pas cette impression qu’il avait de se retrouver face à un adversaire imprévisible. Depuis qu’il était à Huntfield, tout se remettait en question autour de lui, que ce soit en termes relationnels qu’en termes de ses expériences et compétences. Il avait l’impression de retourner à ses débuts, quand il n’était encore qu’un chasseur sans expériences ni connaissances, dépendant des autres pour sa survie et son apprentissage. Un état de faiblesse qui l’écœurait.

Décidément, il n’aimait pas du tout le ton qu’employait cet homme en parlant au barman qui avait subit la violence de celui qu’il avait mit à terre. Il demanda qu’on les serve tout de même, malgré son refus, prétendant que Blood devait sans doute avoir soif. Ce n’était pas réellement le cas mais il n’eut pas le cœur de le contredire, retint un soupir et s’enfonça un peu plus dans la chaise où il était assit.

L’identité demandée mit un peu de temps avant de tomber. John Smith. Un nom classique, banal, parfait si on voulait passer inaperçu dans un pays où on compte les « John Smith » par milliers. Le chasseur réprima un sursaut qui l’aurait conduit à saisit la lame qu’il cachait à l’intérieur de sa veste quand il entendit que cet homme travaillait à l’hôpital, de biens mauvais souvenirs remontant à la surface. Il avait tenté depuis, de coincer ce médecin qui l’avait rendu malade, mais il était forcé de constaté qu’il n’avait rien contre lui si ce n’est son propre état et il semblait être devenu insaisissable. Mais Blood n’était pas assez stupide pour s’attaquer seul à un Cavalier. Combattre le mal oui, partir pour une mission suicide dont il n’était pas sûr de ressortir vainqueur ou au moins emporter son adversaire avec lui était hors de question. Trop de choses dépendaient d’eux, les chasseurs, pour qu’il se permette de mourir bêtement. Alors il rongeait son frein et vivait. Pour le moment.

John souligna quelque chose de juste dans les propos qui suivirent : la présence des créatures dont tous ou presque avaient connaissance à présent ; peut-être est-ce une bonne chose que les habitants de Huntfield sachent ? Cela permettait aux chasseurs d’agir plus vite et de faire de la prévention sans être pris pour des illuminés. Mais il n’osa pas lui dire qu’il était lui-même un chasseur. Peut-être le savait-il déjà, mais Blood préféra rester prudent, sa dernière altercation avec le docteur Porter toujours en mémoire.

Le barman revint vers eux, leur apporta leurs boissons. Blood saisit la sienne, permettant à l’autre de claquer les récipients ensemble de façon festive, puis le chasseur reposa la sienne le plus discrètement possible. Il ramena l’attention sur eux quelques secondes par une exclamation que Blood jugea déplacée. Puis John Smith prit une grosse gorgée avant de remarquer que Blood ne buvait pas et l’interrogeant à ce sujet, tout en gardant ce ton bourru qui semblait le caractériser. Un rire, et un nouvel encouragement, se basant sur le fait qu’il était médecin suffirent à l’agacer.

« Ecoutez » commença-t-il poliment mais d’un ton assez froid « J’apprécie votre invitation ainsi que votre compagnie, mais je ne suis pas un gros buveur contrairement à vous semble-t-il. De plus, je préfère avoir les idées claires car comme vous l’avez si bien souligné, Huntfield regorge de dangers ces derniers temps. »

Et, pour donner un peu plus de poids à ses paroles, il vit glisser sa boisson vers John Smith du dos de la main.

Spoiler:

Blood ne voulait absolument pas boire de verre. En effet, ce dernier se montra soudainement strict. Il haussa le ton sur Malphas en insistant bien qu'il voulait garder les idées claires. Pourquoi? Pourquoi trainait-il dans un bar si miteux? Pourquoi trainait-il dans un bar où quasiment tous les gens buvaient de la bière ou de l'alcool? Et surtout, quel homme refuserait-il de se faire offrir un verre? Ce n'est qu'un verre, il n'y a rien de mal à boire cela avec un inconnu afin de faire connaissance. De plus, cet homme s'amusait à juger Malphas. Oui! Cette phrase était en boucle dans sa tête. "Je ne suis pas un gros buveur comme vous". Est-ce qu'on est un gros buveur quand on veut juste partager un verre avec un ami? D'habitude, Malphas sait facilement se contrôler et ne se met jamais en danger en se mettant en colère, mais il n'avait jamais vu quelqu'un de si impoli et si irrespectueux. Oui, cela avait fait remonter quelques souvenirs d'enfance, notamment lorsque son père buvait tellement d'alcool qu'il battait son propre fils. Cela faisait seulement quelques minutes qu'ils se parlaient, et Malphas avait déjà une très mauvaise impression sur cet homme. Il y avait longtemps que quelqu'un lui avait fait remonter de si mauvais souvenirs. De plus, il ne l'avait pas fait exprès! "J'offre un verre à ce héros, et il m'insulte et m'humilie!" pensait-il.

Maintenant, Malphas était sûr de lui. Il allait également se montrer très désagréable en montrant sa vraie nature. Mais pas tout de suite, Malphas allait un peu jouer avec lui comme il adore faire avec toutes ses victimes, et s'il voulait soudainement se défendre, ce chirurgien reste un démon, il n'avait aucune chance face à lui. Il n'avait pas de sac à ses pieds, donc aucune arme possible face à lui.

Il prit de nouveau son verre, et bu le reste en une gorgée. Il sourit, et leva la main de nouveau afin que passer une nouvelle commande. "Hé toi!" cria-t-il avec une voix qui ne passe pas inaperçue afin que tout le monde regarde les deux personnages. Oui, Malphas avait remarqué juste avant que l'homme en face de lui n'aimait pas trop attirer l'attention sur lui. Le barman se retourna par réflexe, et regarda le chirurgien. "Ouais toi le nul! Ramène encore un verre pour moi et mon ami!" Il regarda ensuite Blood. "J'te dis que tu vas boire les verres ok? C'est ta soirée, et tu vas boire les verres que je t'offre ok?" dit-il avec une voix très autoritaire, mais avec une expression qui ne correspondait pas au ton de la voix. Oui, il avait des yeux grands ouverts, avec de nouveau son sourire narquois. Mais là, il ne voulait pas cacher son sourire. "Aufait', j'ai donné mon nom, tu ne veux pas donner le tien?". Soudain, il hurla dans le bar "Je te fais peur peut-être? Tu n'as pas envie de donner ton identité". Il voulait montrer qu'il n'avait pas peur de se montrer fou, voire ridicule et qu'il n'avait pas peur de se montrer en public.

Blood n’avait pas voulu se montrer si sec envers ce John Smith qu’il ne connaissait que fort peu, mais il était difficilement supportable pour le chasseur qu’un inconnu le pousse à la consommation. Peut-être aurait-il du l’expliquer, mais il n’était pas non plus de ceux qui se livrent facilement, sans honte et avec humour aux autres. Il ne sourit pas en parlant de son passé, il a, au contraire, un air grave et une attitude montrant qu’il s’en était sorti seul et qu’il comptait bien à ce que cela continue en ce sens. Il n’avait pas besoin de pitié ou de compassion, il avait simplement besoin de son espace et de sa liberté, de pouvoir dire non quand il le voulait sans pour autant se sentir coupable, il voudrait pouvoir se sentir intégrer sans pour autant devoir agir autrement que par conviction.

Mais il n’est pas de ceux qui trouvent les mots, il se tait et se noie dans ce silence qu’il impose, qu’il s’impose. Il parle, parfois, il explique, mais le mal est déjà fait.

Le chasseur avait remarqué que sa réponse n’avait pas plut à son camarade. Sa posture avait changée, il s’était un peu crispé, comme un animal qui tend les muscles avant d’attaquer. Il comprenait que son attitude à lui avait pu être blessante pour cet homme qui ne voulait que le remercier, le féliciter d’avoir fait cesser un acte d’agression purement gratuit, mais le chasseur ne tenait pas à ingurgiter plus d’alcool que la bière qu’il avait bu précédemment.

C’est alors que John interpela le barman de façon déplaisante, insultante pour lui et ce qu’il avait subit dans son établissement, ruinant un peu plus l’amour propre de cet homme déjà bien amoché par cette aventure. Il lui commanda d’autres boissons, souriant tout en ordonnant à Blood de boire. Comme s’il avait un pouvoir quelconque sur cette situation. Et le chasseur trouva cette attitude révoltante. Il hurla dans le bar, attirant sur eux l’attention des autres consommateurs. Blood passa une main lasse sur son visage, décidé de tenter la diplomatie avec cet individu qui semblait tout un coup devenir incontrôlable, presque dangereux pour lui et pour les autres. Sous l’énergie de sa propre colère, l’homme s’était levé de sa chaise et le regardait de haut. Lui, resta calmement assis et le regarda fixement.

« Blood Crawfield. C’est mon nom. » Commença-t-il en retenant un soupir « A présent rasseyez-vous, si vous tenez tant que cela à m’offrir à boire offrez moi un soda, je ne tiens pas à boire plus d’alcool ce soir. »

Neutre. Calme. Proposant une solution qui pourrait lui convenir. Un remerciement qu’il était prêt à accepter. Mais pourtant, inexplicablement, peut-être pour réagir face à cette attitude enfantine qui le hérissait, il se surprit à sourire et à ajouter :

« Et pour information, il n’y a rien que je craigne, vous deviez vous en douter non ? »

Son regard était dur, confiant, rien ni personne n’aurait su ébranler cette conviction qui l’habitait. Oui, il ne craignait que peu de choses, et elles sont hors de portée des humains.

Malphas était très impressionné du calme de son nouveau camarade. Oui, il avait beau attirer l'attention de tout le monde en criant et en faisant de grands gestes, cet homme restait impassible, concentré et savait faire preuve de sang-froid. Bien souvent, les autres individus auraient tourné la tête afin de vérifier si l'assemblée l'observait. Ils auraient également demandé de crier moins fort. Et d'autres encore auraient accepté le verre d'alcool afin que Malphas se calme. Mais cet individu était différent. Il savait garder le contrôle de situations difficiles.

Après que Blood ait dit son nom, Malphas arrêta de faire son numéro. Il sourit, et s'assit ensuite à sa place. "Blood Crawfield… Très joli nom. Ce n'est pas un nom courant". Il regarda ensuite le barman. "Pour finir, tu peux ramener un soft, c'que tu veux" dit-il plus calmement avec un peu plus de respect. "Mon camarade ne veut vraiment pas boire un verre…". Il regarda de nouveau son camarade. "Blood Crawfield, est-ce que je peux vous demander quelle profession avez-vous? Et vous êtes originaire de Huntfield?". Il commença à poser beaucoup de questions, les unes moins importantes que les autres. Malphas avait simplement envie de parler à un individu inconnu. Il avait envie de faire connaissance.

Mais au bout de quelques minutes à écouter Blood parler, Malphas commença à s'ennuyer, et pensa à tout et n'importe quoi, tout en faisant semblant de l'écouter. Oui, il n'avait encore aucune piste pour trouver Emmy Stinger ainsi que son copain démon qui l'a piégé et l'a fait retourner en enfer il y a deux ans. De plus, il ne savait pas encore ni où, ni comment trouver ce démon du nom de Méphistophélès qui s'amusait à lui mettre des bâtons dans les roues en lui prenant son identité. Tant de questions n'étaient pas encore résolues, dont la principale était simple. Pourquoi prenait-il son identité?

Soudain, pendant que Blood continua de parler, Malphas eut une idée. Pourquoi ne pas faire la même chose pour Méphistophélès? Oui, lui mettre des bâtons dans les roues pourrait aider Malphas à le retrouver ou mieux encore, que quelqu'un fasse le sale boulot en l'éliminant. Il avança ses coudes sur la table, approcha son visage et appuya son regard sur Malphas quand soudain, il montra ses yeux noirs. Le visage de Blood changea directement, mais avant qu'il n'eût pu faire le moindre mouvement, il balança Blood en arrière à l'aide de son pouvoir de télékinésie, mais sans lui faire mal afin de ne pas lui blesser. Oui, il avait un petit projet pour lui. Tout le monde commença à crier et à bouger dans tous les sens, à vouloir sortir du bar. Il continua à maintenir Blood à terre afin qu'il ne sache plus bouger. "Tu es surpris hein? Tu sais quoi? Je ne m'appelle pas John Smith, mais Méphistophélès!" dit-il "Ne t'inquiète pas, je ne vais pas te faire du mal, je dois simplement te parler".

Finalement, le fait d’informer John Smith de son identité suffit à détourner son attention du pauvre barman qui subissait son courroux plus tôt. Après tout, il était le premier à reconnaitre qu’il était particulier de s’appeler Blood. Une fantaisie de sa mère, et, sans doute un destin déjà tout tracé pour lui. Né pour la chasse. Né pour porter le pourpre. Finalement calmer, son compagnon commanda des boissons soft pour la suite de la soirée, ce qui convenait parfaitement au chasseur. John Smith lui demanda alors d’autres choses plus personnelles, questions auxquelles il répondit de bonne grâce.

« Je ne suis pas originaire d’Huntfield, je suis arrivé il n’y a pas longtemps. » commença-t-il « J’ai été récemment engagé par le commissariat, mais cela fait peu de temps. »

Ses réponses étaient courtes, et il vit clairement l’ennui gagner John Smith. Blood n’était pas un grand parleur, aussi cela ne l’étonna pas réellement, et peut-être même que cela mettrait fin à leur entrevue, bien qu’il ne le souhaitait pas directement.

Et, alors que le silence s’installait doucement, son vis-à-vis approcha son visage du sien. Blood se demanda ce qu’il pouvait bien se passer dans la tête de cet homme pour qu’un tel geste soit posé dans cette réalité. Sans doute une critique concernant ce pauvre barman, mais il n’en était rien. Blood réprima difficilement un sursaut quand il vit les yeux de John Smith devenir noir. Ainsi donc cet homme était un démon. Il aurait dû s’y attendre. John Smith était un nom bien trop répandu, spécialement créé pour se fondre dans la masse grouillante. Et son comportement ! Qui pouvait encore être aussi infect avec d’autres personnes avec ce qu’il se passait à l’intérieur des murs de la ville !

Et c’est alors que Blood fit une réalisation. Les démons étaient déjà dans leurs murs ! Ils n’étaient pas en dehors, attendant leur heur pour prendre la ville d’assaut. Non. Ils étaient déjà là, dans l’ombre, agissant pour leur cause dans qu’ils ne s’en doutent.

D’un coup, il se retrouva propulsé à travers la pièce. La panique commença à se faire tout autour d’eux. Blood tenta de se relever, mais le démon avait ce plaisir perfide de le maintenir au sol. Le chasseur le foudroya du regard, mais cela ne l’empêcha pas de s’approcher encore. Il continua à maintenir une pression telle que petit à petit, Blood fut privé de sa totale liberté de mouvement. Il lui donna son nom. Méphistophélès.

« On ne peut pas dire que j’ai le choix. » dit-il, sarcastique. « Je ne peux pas vraiment décidé de partir. »

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