III. New York I love You [Privé: Bélial/Caym]

Une tournée des Grands-ducs, c’était là le programme que s’était confectionné Bélial. Oh certes il était probablement un des derniers démons à sortir des Enfers après que Lucifer en soit lui-même parti, mais Bélial n’était pas du genre pressé. Il était bien trop orgueilleux pour arriver en même temps que toute la populace, préférant de loin se faire un peu désirer. Ainsi il arrivait sur un continent qu’il n’avait jamais foulé, l’Amérique. C’était dans une petite bourgade perdue que tout semblait se passer, mais avant de s’y rendre, il souhaitait se faire sa propre idée de ce que les U.S.A avaient à offrir. Cela faisait plusieurs semaines qu’il créchait à New-York. Ah New-York, quelle ville démentielle ! Lorsqu’il avait levé pour la première fois les yeux vers les immeubles qui frôlaient les nuages, il avait été pris d’un fou rire immense, tant l’ironie de la situation l’amusait. Voilà ce que les Hommes avaient fait de Babel et de la colère de Dieu. Chaque gratte-ciel qui s’élevait au-dessus de l’Hudson était un bras d’honneur en plus en direction du Tout-Puissant. La voilà la Babylone des Temps Modernes ! Le vieux démon se félicitait d’avoir choisi la Big Apple comme point final de sa visite touristique des Etats-Unis. En vérité, il pourrait y passer des siècles, tant cette ville était un concentré grouillant de tout ce que l’humanité faisait de pire et de meilleur.

C’était l’été et la réflexion du soleil sur les vitres des immeubles donnait presque l’impression d’être de retour à la maison. Les New-Yorkais avaient chaud, et plus que jamais les rues puaient le vice. Le soleil était à son zénith, et malgré la chaleur, Bélial avait coiffé sa tête d’un bonnet et avait sur le dos une veste en jean usée qu’il affectionnait beaucoup. Ses écouteurs à plein volume, il marchait nonchalamment dans les salles du MET, s’arrêtant de temps à autre devant une peinture ou une sculpture pour mieux en apprécier les détails. Il s’amusait de revoir ici des œuvres qu’il avait pu admirer du temps où elles étaient encore à leur place, dans des temples romains ou des églises. Bélial se fondait plutôt bien dans la masse de visiteurs, si ce n’est qu’il avait quelque chose chez lui  d’indéfinissable qui faisait tourner la tête à certains d’entre eux. Il avait fait le tour de tous les musées de la ville, mais c’était bien celui-là son préféré. Sans doute parce qu’il trouvait plus amusant de voir les gens s’extasier sur une peinture représentant une scène de la Bible, sans se douter un seul instant que les charmants minois qui avaient servis de modèles avaient eu l’occasion de connaître l’artiste d’une façon peu chrétienne. Ainsi les Saints, les Anges et les Prophètes se retrouvaient  représentés sous les traits des pires pécheurs.

Bélial détourna son regard de l’œuvre. Il était dans ce musée depuis des heures, et il était temps pour lui d’en partir. C’est avec l’enthousiasme d’un enfant qu’il se dirigea vers Central Park, le sourire aux lèvres. Depuis qu’il était arrivé sur le sol américain, il avait pu rattraper tout  son retard quant aux progrès des Hommes, les découvertes qu’ils avaient faites, mais aussi et surtout, le soin qu’ils avaient porté à améliorer leur façon de se distraire et de s’amuser. Pourtant, si les démons et les hommes n’avaient pas de secrets pour Bélial, il restait une vaste partie de la Création qui échappait au savoir du vieux démon. C’était donc pour en apprendre plus sur ces créatures qu’il avait donné rendez-vous à un de ses petits frères démoniaque. Un dénommé Caym. Jeune démon, une crevette par rapport à l’antique monstre qu’il était. Mais une crevette qui en savait beaucoup sur les êtres surnaturels qui n’étaient ni anges ni démons. Il s’assit à une des tables de picnic spécialement installées pour la saison estivale, et dégusta les premières gorgées du Soda qu’il venait de s’offrir. Son aura dissuadant les personnes à la recherche d’une place de s’inviter à sa table, alors qu’il attendait que son invité arrive.